LE PHOTOGRAPHE, récit d'une mission en Afghanistan
Un pays ravagé
Présence soviétique, guerre civile, talibans, intervention des États-Unis, de l'Europe... (10 ans déjà que l'Occident est en guerre en Afghanistan)... Finalement, cela fait des décennies que l'Afghanistan n'a pas connu la paix.
Régulièrement aux informations on annonce un attentat, le décès d'un soldat de la coalition ou une « bavure » de l'OTAN... Ce pays dont tout le monde a entendu parler reste difficile à appréhender. Troubles locaux, intérêts nationaux, stratégies internationales... Et que dire de son voisin le Pakistan, pays au gouvernement
ô combien trouble: affirmant être un partenaire des Américains dans la lutte anti-terroriste mais abritant celui qui a illustré l'un des pires exemples de cette violence: Ben Laden (tué en mai 2011 à Abbottabad, près d'Islamabad) !
En 1986, le photographe Didier Lefèvre -chaleureusement rebaptisé Ahmadjan lors de ce reportage- part pour le Pakistan où il rejoint une équipe de Médecins Sans Frontières. Leur objectif: se rendre en Afghanistan pour y installer un « hôpital » de fortune.
Chirurgiens, médecins, infirmiers parcourront des kilomètres à travers les montagnes en distribuant leur aide tout au long du chemin. Pour notre photographe, ce sera un mois de préparation, un mois de trajet (à pied) et... un mois sur place, avant de rentrer, fin de mission.
Un ouvrage unique
Écrit et dessiné des années plus tard (2003 pour le 1er tome, 2006 pour le 3e et dernier), Emmanuel Guibert, Frédéric Lemercier et bien sur Didier Lefèvre nous emportent totalement avec eux dès les premières pages. Entre les cases du dessin s'insèrent des photos (aux différents formats) pour marquer le lecteur d'un peu plus de réalisme, pour un peu plus de vérité encore. Photos et dessins sont impressionnants de concordance. Le récit est efficace, tantôt descriptif tantôt émouvant.
En refermant le livre (et ne ratez pas la postface), on se pose la question: à quels sacrifices serions-nous prêts pour revenir avec une histoire à raconter, pour transmettre un épisode de la vie d'inconnus, témoigner depuis un pays en guerre...? Se pose aussi la question de la reconnaissance professionnelle, qui peut ne pas toujours sembler proportionnelle aux efforts fournis... mais ça, c'est une autre histoire.
Cette bande dessinée nous a emmené loin de nos bureaux, sorti du métro ou plus généralement de notre quotidien. Quelques heures de lecture nous auront certainement, d'une certaine façon, rapproché des Afghans...
Didier Lefèvre est mort en janvier 2007.
Voici un lien vers une page où l'on peut lire une interview des certains protagonistes de cette mission, et sur le processus de création de cette bande dessinée:
http://www.actuabd.com/Guibert-Lefevre-et-Lemercier-Dans-notre-recit-le-vecu-est-le-vecteur-de-comprehension
Bonne lecture à tous.
"Le Photographe", de Guibert, Lefèvre et Lemercier, Éditions Aire Libre/Dupuis. 38 € (prix éditeur de l'intégral avec DVD)
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